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Légumes Un géant chinois s'invite dans l'industrie française de la tomate

PARIS, 9 avril 2004 - Le géant chinois de la tomate Chalkis, filiale du premier groupe agroalimentaire chinois, Xinjiang, a acheté la majorité du leader français de la tomate transformée Conserves de Provence et s'appuiera sur son allié français pour se développer à grande échelle sur le marché européen, ont annoncé les deux groupes vendredi.

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Chalkis, numéro deux mondial de la tomate, qui a une capacité annuelle de transformation de 2,5 millions de tonnes - près d'un tiers du marché européen - a payé 7 millions d'euros pour acquérir 55% de Conserves de Provence, a expliqué son président Liu Yi lors d'une conférence de presse.

Son ancien propriétaire, la coopérative agricole Le Cabanon, en gardera 45%, a précisé le président de la coopérative Joël Bernard, qui était juqu'ici président de Conserves de France et qui cèdera sa place à M. Liu. Conserves de Provence réalise un chiffre d'affaires annuel de 68,5 millions d'euros, en majorité auprès des grandes surfaces qu'il approvisionne en sauces et ketchup pour leurs marques de distributeurs. Il transforme 60.000 tonnes produites par les agriculteurs de la coopérative provençale, et importait un peu de tomates de l'extérieur.

Mais la société française avait de plus en plus de difficultés à résister à la concurrence mondiale, surtout chinoise : la Chine a quadruplé ses exportations de tomates transformées en Europe depuis 2000. Or le coût de revient des tomates transformées chinoises est inférieur de 30% à 40% aux coûts européens, a souligné M. Bernard.

L'accord prévoit que la société française importera les tomates chinoises transformées (généralement des fûts de concentré de tomate), les retransformera, les conditionnera et les vendra en Europe. Dans un premier temps, la production chinoise représentera les deux tiers de l'activité de Conserves de Provence, donc le double de la production française (soit quelque 120.000 tonnes) puis la part chinoise progressera sans doute davantage, a laissé entendre M. Bernard.

En échange la société française a obtenu la garantie pendant 10 ans de maintenir la production des agriculteurs français de la coopérative, sous une marque de terroir qui valorisera la Provence. "Le marché de la tomate transformée est extrêmement mondialisé. Sans cet accord, commercialement nous étions morts, la production française coûte trop cher", a commenté sans détours le directeur des ventes aux grandes surfaces de Conserves de Provence, Jean-Patrick Basso, en marge de la conférence de presse.

"Les Italiens nous prenaient des parts de marché, nous ne pouvions pas être compétitifs face à eux. Maintenant nous pourrons nous battre avec les mêmes armes", a-t-il poursuivi. Ce sont donc les Italiens, qui produisent la moitié du marché européen, soit 4 millions de tonnes, généralement dans de petites exploitations, qui doivent s'inquiéter, a noté un professionnel. La France elle n'était déjà plus qu'un acteur très petit avec une production de seulement 250.000 tonnes pour une consommation de 800.000 tonnes.

Chalkis, qui a vu sa taille se multiplier par 10 entre 2001 et 2003, ne compte pas s'arrêter là: il veut doubler ses ventes d'ici 2007, et acheter environ 7 sociétés agroalimentaires occidentales, dont 2 ou 3 européennes, une australienne et une américaine, a précisé M. Liu. M. Bernard a reconnu avec embarras avoir dû faire un "gros travail d'explication" auprès des producteurs français.

Les experts craignent eux que cette alliance franco-chinoise, une première dans le monde agroalimentaire français, ne constitue un "cheval de Troie" pour le groupe chinois en Europe pour s'imposer sur le marché de la tomate mais aussi sur d'autres productions.


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